Vinification
Les vins d’argile, retour aux origines

Extraits de l’article paru dans le numéro 154
Amphore, dolia, jarre, … quel que soit le nom que l’on donne à ces récipients, les vins élevés dans la céramique et enfin les objets eux-mêmes.) connaissent un succès croissant auprès des amateurs. Ces derniers n’hésitent pas à payer plus cher pour acquérir ces bouteilles produites en petite quantité. La terre cuite ou le grès conférerait au vin des qualités tactiles particu lières et une pureté aromatique. La notoriété grandissante de ces cuvées a suscité un regain d’intérêt des vignerons pour les techniques de vinification ancestrales qui marient le raisin et la terre. Cantonné, au départ, à de petits do maines de la mouvance biodynamique et “na ture”, leur usage s’est élargi jusqu’aux grands crus. L’argile a progressivement remplacé le bois pour une partie des cuvées haut de gamme. Souvent associées aux vins de macération, ces amphores sont également utilisées pour des élaborations plus classiques.
L’influence italienne
Plusieurs pays européens (Géorgie, Arménie, Espagne, Portugal, …) avaient conservé cette méthode ancienne de vinification mais la véri table impulsion du retour de la terre cuite a débuté, en Italie, il y a plus d’une vingtaine d’années. Ce mouvement a été porté principa lement par des vignerons avant-gardistes et fortement médiatisés comme Josko Gravner (R&B 43 et R&B 145), Franck Cornelissen (R&B 102 et R&B 135) ou Elisabetta Foradori (R&B 30 et R&B 151). Le recours à la céramique s’inscrivait, par ailleurs, dans un contexte de renouveau des pratiques œnologiques visant à diminuer les intrants, à s’affranchir du bois et de découverte des vins de macération géorgiens (R&B 115). La Slovénie toute proche a servi de porte d’entrée aux bouteilles géorgiennes. Dans les années 2000, inspirés par leurs homologues italiens ou géorgiens, un pe tit nombre de domaines français se sont laissés tenter par l’aventure de l’argile (R&B 105). On peut citer parmi ces pré curseurs le domaine Au Clos d’un Jour (Cahors), Philippe Viret (Vallée du Rhône) ou Stéphane Bannwarth (Alsace). À l’ins tar des Italiens, ils ont contribué, eux aus si, à la notoriété des amphores. À cette époque, le savoir lié à la production de poterie vinaire avait totalement disparu en Italie ou en France, depuis plusieurs siècles. Seules la Géorgie et l’Espagne étaient connues pour être encore ca pables de fabriquer des céramiques pour la vinification. En dehors de la difficulté pour dénicher un artisan capable de ré pondre à la demande, encore fallait-il que ces objets arrivent en bon état ou qu’ils soient correctement réalisés. Stéphane Bannwarth a par exemple reçu des qvevri (amphores géorgiennes généralement en terrées) brisés et d’autres dont l’enduit intérieur était défectueux ; il raconte : « La qualité de la cire qui sert de revêtement im perméabilisant est tout aussi importante que celle de l’argile. Certains fabricants ne prennent pas la peine de sélectionner les bonnes cires voire les mélangent ou les remplacent par d’autres matières comme la graisse. Ces enduits médiocres transmettent de mauvais goûts au vin. »