LeRouge&leBlanc n°147

La revue

N° 147
17 €
13 €

Cinsault : le retour en grâce d'un cépage accessoire

A.O.P Pomerol, grands vins, grands prix

Cinsault, retour en grâce d'un cépage "accessoire"

Château Simone une verticale de 2019 à 1973 !

Journal de vigne : le stress des vinifications

Tonnellerie, le bois au service du vin

  • Domaine Serre Besson (Vinsobres)
  • Château de Bouillerot (Bordeaux)

 

52 pages
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Extrait de la revue

Faut-il continuer à dénigrer Bordeaux ?

Depuis une vingtaine d’années, les vins de Bordeaux n’attirent plus la nouvelle génération des amateurs de vins et de nombreux restaurants bistronomiques ou bars à vins se vantent presque de ne pas en proposer à leur carte. Les causes de ce désamour sont multiples : une image ringardisée de “vin des parents”, les excès du goût parkérisé, des prix explosifs et des pratiques culturales et œnologiques à contre-courant de la tendance “nature” de plus en plus prisée par les jeunes amateurs d’aujourd’hui.

Mais les temps changent. Le « Moi, je ne bois plus de bordeaux » est devenu à son tour dépassé pour plusieurs raisons. D’abord, hormis une cinquantaine de châteaux pratiquant des prix inabordables pour une énorme majorité de consommateurs, bon nombre de domaines proposent d’excellents vins entre 15 (voire parfois moins) et 30 €.

Ensuite, le travail à la vigne et en cave a évolué. Les surfaces certifiées “bio” ou en conversion dans le Bordelais ont quasiment doublé ces trois dernières années et se trouvent aujourd’hui au niveau de la moyenne française (21 % en Gironde contre 20 % en France en 2021, source Union Girondine des Vins de Bordeaux). Un chiffre encourageant quand on sait que, dans l’ombre des beaux châteaux à l’insolente prospérité, on trouve une part non négligeable d’appellations peu médiatisées où végètent une myriade de petits viticulteurs qui vendent leur production en vrac ou en bouteilles à des prix dérisoires, voire soldent leur vin à perte pour se débarrasser d’invendus estimés par la profession à 20 % de la production. Pour eux, la conversion est quasi impossible, d’autant que le climat océanique, moins favorable que, par exemple, celui du Languedoc, du Rhône sud ou de l’Alsace, la rend encore plus difficile.

Néanmoins, plusieurs domaines viticoles de qualité ont pris conscience de l’importance des méthodes culturales et de la nécessité de diminuer les recours à la “pharmacopée œnologique”. On peut toutefois regretter qu’une minorité seulement des domaines très prospères de Bordeaux envisagent de se convertir alors qu’ils en ont largement les moyens.

Il se passe quand même quelque chose au royaume bordelais depuis quelques années. De grands noms ont obtenu très récemment le label “bio” (ou sont en conversion), tels les châteaux Angélus, Cos d’Estournel, Gruaud-Larose, Lafite-Rothschild, Latour, Margaux, Palmer, Montrose, Saint-Pierre, La Lagune, Rieussec ou Yquem. Des pionniers comme Pontet-Canet (certifié en “bio” et en biodynamie en 2010) ou Guiraud (en 2011) ont ouvert le chemin, mais il a fallu que l’excellence des productions de ces différents domaines s’impose pour que soit admise la relation entre un sol préservé de la chimie et la qualité d’un vin. La même démarche (à une vitesse sans doute supérieure) se retrouve dans de plus en plus de domaines à la notoriété moindre et aux prix en revanche presque toujours très raisonnables (cf. par exemple ci-dessous la liste de nos derniers “Coups de Cœur” bordelais).

Au R&B, sans jamais négliger ce vignoble, nous n’avons publié qu’une dizaine d’articles sur le Bordelais entre 2000 et 2020. Mais, depuis deux ans, plusieurs rubriques “Coups de cœur” (Château Doyac, Château de La Vieille Chapelle, Château Cazebonne, Domaine Osamu Uchida et Château de Bouillerot) et une enquête sur les blancs secs de Sauternes témoignent d’un renouveau d’intérêt du R&B pour les évolutions bordelaises. En publiant ce trimestre un article consacré à l’appellation Pomerol, nous poursuivons notre volonté d’analyser les freins encore existants et les percées qui se font jour. Sans complaisance, comme toujours, mais avec le souci de ne pas tomber dans le piège de ce qui a longtemps été un dénigrement systématique, et qui ne se justifie plus vraiment aujourd’hui.

LeRouge&leBlanc